par Jacques Salvator et Evelyne Yonnet
Au-delà de la familiarité, qui sans doute ne s'imposait pas, cette interpellation n'a qu'un seul but, vous convaincre qu'Aubervilliers peut et veut vous accueillir. La ville et celles de l'intercommunalité prennent en compte les conditions à réunir pour que vous puissiez poursuivre vos travaux de recherche et ouvrir de nouveaux chantiers.
Justement, parce que des "générations de chercheurs de haut niveau, de réputation internationale, ont été formées à l'EHESS" (Le Monde du 27 octobre), nous ressentons comme un honneur votre venue sur notre territoire.
Nous entendons vos préventions, mais ce site n'est pas "une zone où rien n'est encore prêt". Il s'agit de véritables quartiers aujourd'hui en gestation. Des projets s'inscrivent dans un calendrier crédible : station de métro Proudhon-Gardinoux, aménagement d'une "place monumentale", déjà baptisée place du Front-Populaire avec son cortège de logements, de commerces, de services en tout genre.
Certes, l'espace qui sépare l'ancienne ceinture de fortifications autour de Paris et la banlieue se nommait la "zone", en référence à la portion de territoire non aedificandi de 250 mètres de large gérée en principe par l'autorité militaire et dédiée à la protection de la capitale. Mais cette zone, "rebut de bâtisses tenues par des gadoues noires au sol" (Louis-Ferdinand Céline dans Voyage au bout de la nuit), est en perdition dans la mémoire "des banlieusards" (expression lancée pour la première fois en 1889).
Lorsque vous rejoindrez vos nouveaux locaux à proximité ou à quelques encablures de la Maison des sciences de l'homme, du Conservatoire des arts et métiers, de la Cité des sciences, du Centre de recherches internationales de Saint-Gobain et d'un pôle universitaire de plus de 8 000 étudiants, le caractère excentré des lieux ne sera plus qu'un vieux et pénible souvenir que nous partagerons avec vous.
Reste un argument majeur, "la concentration des ressources intellectuelles nécessaires à la recherche". De ce point de vue, les élus locaux que nous sommes ne peuvent prétendre à une quelconque expertise. Peut-être, simplement, certains peuvent-ils faire appel à quelques références historiques...
Par exemple, le choix des papes Innocent III, Honorius III, Grégoire IX, respectivement 174e, 175e et 176e papes, d'autoriser les ordres "prêcheurs et mineurs", à enseigner hors les murs des monastères. Ainsi Thomas d'Aquin put quitter le mont Cassin et Naples pour l'université de Paris, à l'époque considérée comme malfamée dans les cercles du pouvoir ecclésiastique.
Vous connaissez la suite et les conséquences de cette décision essentielle et courageuse.
Pour lire l'article du Monde des chercheurs de l' EHESS :
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