Le spectaculaire rebondissement de l'affaire DSK met encore plus en évidence les doutes que l'on pouvait avoir sur la pertinence du calendrier de la primaire socialiste pour la présidentielle. Poser comme date limite du dépôt des candidatures le 13 juillet revient à lancer la campagne le 14 juillet, soit exactement au moment où démarrent pour beaucoup les vacances. Il y a quelque chose de surprenant là-dedans : il eut été bien plus logique de lancer la campagne à l'occasion de l'université d'été de la Rochelle, pour la rentrée. Six semaines de campagne, de fin août à mi-octobre, suffisent largement tant l'ensemble des protagonistes sont bien connus de tous, et tant le risque de renvoyer une image de division sera proportionnel à la durée de cette campagne de primaire.
Fixer le coup d'envoi de la campagne fin août aurait notamment permis à celui qui était considéré par beaucoup comme le meilleur candidat à gauche, Dominique Strauss-Kahn, de s'exprimer sereinement après que l'ensemble des accusations pesant sur lui aient été définitivement levées, et chacun de se positionner en fonction de la place qu'il déciderait de prendre (ou pas) dans la primaire à venir. Mais on ne peut pas refaire l'histoire et le calendrier prématuré a contraint un certain nombre de responsables socialistes à se prononcer dès la fin juin, avant même d'avoir connaissance du dernier rebondissement laissant envisager un probable retour prochain de Dominique Strauss Kahn en France, ce qui crée aujourd'hui une situation pour le moins confuse. Cette confusion est d'autant plus grande qu'on ne sait pas exactement quelle sera la réaction in fine de l'opinion après cette campagne médiatique accusatrice et les procès anticipés dont il a été l'objet sur la place publique. La nouvelle plainte déposée contre lui, pour une affaire supposée qui serait vieille de huit ans, laisse de ce point de vue particulièrement dubitatif, suggérant (à tort ou à raison) une forme d'acharnement qui pourrait aussi avoir l'effet inverse de celui escompté. La situation est tellement extraordinaire, les sentiments qu'inspire un tel scenario sont si contradictoires, qu'il est très difficile d'anticiper les réactions possibles des uns et des autres, à commencer par celle du principal intéressé.
Ce que Dominique Strauss Kahn dira lui-même sur tout cela sera donc absolument déterminant, et particulièrement important pour nous tous tant il serait une erreur de croire qu'il puisse être la seule victime politique de cette histoire. Dans ce contexte, la sagesse commande de ne pas se précipiter, et de profiter de la trève estivale pour réflechir au meilleur dispositif susceptible de faire (enfin) gagner la gauche en 2012, en valorisant au mieux l'ensemble de ses atouts et de ses leaders, tout en faisant preuve du plus grand réalisme et pragmatisme.
Marc Guerrien
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